À quelques encablures du quartier de Malmousque, l’île Degaby est bien connue des Marseillais. Pêcheurs et plaisanciers apprécient depuis toujours son mouillage. Les courageux qui s’y rendent parfois à la nage vous raconteront les longs après-midis passés sur ses rochers ou à l’ombre de ses remparts. Ils vous parleront également de sa fameuse grotte immergée ou des poissons “gros comme ça” qu’ils y ont pris, ou même des plongeons spectaculaires qu’ils y ont fait. Pour autant et malgré les mythes qui l’entourent, rares sont ceux qui ont eu la chance de passer la porte de ses remparts.
Derrière ses fortifications, dont la construction fut ordonnée par Louis XIV pour défendre la rade de Marseille, l’Île Degaby abrite un fortin militaire baptisé en l’honneur de l’Amiral Costentin de Tourville. Elle conserve sa vocation militaire jusqu’au début du XXème siècle, avant d’être cédée par l’État à un industriel Marseillais. C’est lui qui lui donne son nom actuel et ce pour faire honneur à sa maîtresse, la danseuse Liane Degaby. Objet de nombreux rêves, de projets inachevés, l’île Degaby change ensuite de propriétaires à plusieurs reprises mais sans jamais réussir à s’ouvrir pleinement aux Marseillais. Jusqu’à l’ouverture de son bar & son restaurant éphémères, en mai 2024 !
La genèse du projet
Après plusieurs années passées à Lima, où ils vont cultiver ensemble une passion pour les arts culinaires, Sofia et Boris Lefevre s’installent à Marseille, ville natale de ce dernier. Pour Sofia, le coup de foudre pour la Méditerranée est immédiat, et en 2022 elle prend avec Boris la gestion de l’île Degaby. Elle entrevoit un potentiel immense malgré les défis posés par l’accessibilité et les caprices de la météo, et imagine un lieu ouvert les jours de beau temps, en symbiose avec la beauté naturelle de la rade de Marseille.
Sofia va à la recherche de partenaires susceptibles de l’aider à insuffler une nouvelle vie à l’île Degaby, et ce à travers la gastronomie. Boris s’appuie quant à lui sur ses talents d’architecte pour trouver des solutions visant à rendre cette île autonome, que ce soit en énergie ou en eau potable, tout en préservant son caractère historique.
Après plusieurs années passées à Lima, où ils vont cultiver ensemble une passion pour les arts culinaires, Sofia et Boris Lefevre s’installent à Marseille, ville natale de ce dernier. Pour Sofia, le coup de foudre pour la Méditerranée est immédiat, et en 2022 elle prend avec Boris la gestion de l’île Degaby. Elle entrevoit un potentiel immense malgré les défis posés par l’accessibilité et les caprices de la météo, et imagine un lieu ouvert les jours de beau temps, en symbiose avec la beauté naturelle de la rade de Marseille.
Sofia va à la recherche de partenaires susceptibles de l’aider à insuffler une nouvelle vie à l’île Degaby, et ce à travers la gastronomie. Boris s’appuie quant à lui sur ses talents d’architecte pour trouver des solutions visant à rendre cette île autonome, que ce soit en énergie ou en eau potable, tout en préservant son caractère historique.
Cette même année, le couple croise le chemin de Sébastien Dugast et Romain Nicoli, fondateurs de Mensa, lors d’une bombance organisée au domaine de Sulauze.
Bons-vivants et passionnés, Sébastien et Romain se sont rencontrés au sein des établissements du chef triplement étoilé Gérald Passedat, respectivement en qualité de chef exécutif et directeur adjoint pendant plus de 7 ans. Ils s’associent pour fonder Mensa en 2021. Leur but : proposer des expériences culinaires cherchant à créer une harmonie entre le terroir, la cuisine, le vin, les convives et le lieu afin de transformer l’instant éphémère en souvenir indélébile.
Depuis sa création, la table de Mensa a déjà investi plus d’une vingtaine de lieux lui permettant de se former aux défis de la cuisine nomade. Ambitieux et en quête de nouveaux challenges, s’associer au projet de l’île résonne alors comme une évidence pour Sébastien et Romain.
Au cours de leurs premiers échanges, Sofia, Boris, Sébastien et Romain vont se découvrir des valeurs communes comme le partage, la simplicité, le goût des bonnes choses, et leur passion pour la nature. S’en suivent alors plusieurs déjeuners, dîners, soirées festives, ou événements privés organisés par l’équipe sur l’île Degaby. Cela leur permet d’appréhender les enjeux logistiques et météorologiques propres à ce lieu, et c’est à partir de ces évènements que le fil d’un projet commun va se nouer.
Cette même année, le couple croise le chemin de Sébastien Dugast et Romain Nicoli, fondateurs de Mensa, lors d’une bombance organisée au domaine de Sulauze.
Bons-vivants et passionnés, Sébastien et Romain se sont rencontrés au sein des établissements du chef triplement étoilé Gérald Passedat, respectivement en qualité de chef exécutif et directeur adjoint pendant plus de 7 ans. Ils s’associent pour fonder Mensa en 2021. Leur but : proposer des expériences culinaires cherchant à créer une harmonie entre le terroir, la cuisine, le vin, les convives et le lieu afin de transformer l’instant éphémère en souvenir indélébile.
Depuis sa création, la table de Mensa a déjà investi plus d’une vingtaine de lieux lui permettant de se former aux défis de la cuisine nomade. Ambitieux et en quête de nouveaux challenges, s’associer au projet de l’île résonne alors comme une évidence pour Sébastien et Romain.
Au cours de leurs premiers échanges, Sofia, Boris, Sébastien et Romain vont se découvrir des valeurs communes comme le partage, la simplicité, le goût des bonnes choses, et leur passion pour la nature. S’en suivent alors plusieurs déjeuners, dîners, soirées festives, ou événements privés organisés par l’équipe sur l’île Degaby. Cela leur permet d’appréhender les enjeux logistiques et météorologiques propres à ce lieu, et c’est à partir de ces évènements que le fil d’un projet commun va se nouer.
Une démarche d’autonomie
Motivée par le défi posé par cette île, non raccordée aux réseaux d’électricité et d’eau potable, notre équipe a conçu un projet ambitieux sur le plan environnemental : L’énergie solaire, captée par des panneaux photovoltaïques, alimente le site, et le surplus d’énergie produit sert à la désalinisation de l’eau de mer. Côté déchets, un système de compostage réduit l’empreinte carbone du restaurant. L’utilisation de ce compost et la récupération des eaux de pluie pour l’irrigation favorisent la croissance de la végétation insulaire.
Enfin, toujours dans un souci d’autonomie, le chef favorisera des techniques de cuisson à la flamme qui devraient ajouter du plaisir au souhait de minimiser l’empreinte écologique du restaurant.
Motivée par le défi posé par cette île, non raccordée aux réseaux d’électricité et d’eau potable, notre équipe a conçu un projet ambitieux sur le plan environnemental : L’énergie solaire, captée par des panneaux photovoltaïques, alimente le site, et le surplus d’énergie produit sert à la désalinisation de l’eau de mer. Côté déchets, un système de compostage réduit l’empreinte carbone du restaurant. L’utilisation de ce compost et la récupération des eaux de pluie pour l’irrigation favorisent la croissance de la végétation insulaire.
Enfin, toujours dans un souci d’autonomie, le chef favorisera des techniques de cuisson à la flamme qui devraient ajouter du plaisir au souhait de minimiser l’empreinte écologique du restaurant.
L'Histoire de l'île degaby
D’après le textes d’ Adrienne BORRELLY-STRAPPAZZON
« Ils étaient très heureux et pour y montrer ce bonheur qu’on ne saurait cacher, l’industriel offre à son égérie une île où ils chercheront le rêve à deux. «On y fera un théatre pour les muses des mers» s’exclamera Liane Degaby…
Tout le monde s’accorde à trouver le séjour enchanteur, on parle d’heures délicieuses au milieu des flots et l’azur, on consigne dans le livre d’Or le souvenir des minutes douces, d’instants ineffaçables…
Cette minuscule traversée — pour laquelle il fallait l’autorisation du capitaine de frégate, chef de l’État Major — prenait des allures de croisière idyllique, d’invitation au voyage : le soleil, les rochers, la mer… »
Il existe en longeant le littoral de Marseille sur la Corniche, entre l’ancienne Réserve et l’anse de Maldormé, un petit îlot carré servant de préambule, d’avancée, en quelque sorte, aux groupes d’îles d’If, de Ratonneau et de Pomègues qui s’étirent à l’horizon. Dans les brumes estivales, il semble posé comme un château de sable, à la portée de l’épuisette d’un géant marin.
Cette île s'appelle Degaby, anciennement île du Fort de Tourville ou fort d'Endoume. Elle est précédée de l'île Daume, de Doume, qui donna son nom au village d'Endoume avec lequel elle forme un archipel.
Des rochers de Malmousque, les baigneurs ont toujours tenté de l'atteindre de quelques brassées de crawl ; d'un jet de seau de sable, les enfants y portent en rêve leurs trésors et leurs conquêtes. Le château d'If, juste derrière à l'ouest, majestueux, Avec sa belle forteresse, reste la citadelle inattaquable qu'ils approcheront peut-être plus tard en bateau. Mais cette île, cette roche blanche qui déborde à peine du fortin, est à la fois proche et lointaine, comme le rêve peut sembler tout à coup accessible, et s'éloigner soudain ; est-ce le balancement des vagues qui crée cette magie ?
II faut dire qu'en matière de légendes, elle s'est posée un peu là. Bien sûr, rien à voir avec sa voisine If et ses fortifications, son comte de Monte-Cristo et l'abbé Faria, son prétendu Masque de fer ou ses prisonniers enfermés sous la Révolution.
Mais ce fort à l'architecture sévère, fait de belles pierres taillées dont les murailles crénelées se dressent à la fois naïves et inquiétantes, permet lui aussi bien des vagabondages de l'esprit...
On peut imaginer que déjà du temps de Phocée, l'île Degaby servit aux Grecs pour observer le rivage avant de choisir le Lacydon plus beau, plus grand et surtout plus abrité dans lequel la flotte phocéenne s'installerait pour y fonder Massalia.
Au XVIème siècle, l'île était une sorte de barbacane, une avancée maritime précédant les véritables fortifications. Elle protégeait la ville sur le flanc sud et était censée tomber la première en cas d'invasion. Louis XIV décida, afin de renforcer les défenses de la rade, d'y faire bâtir un fortin sur les restes d'un aménagement provisoire accolé à une poudrière dont le bâtiment existe toujours. On donna à ce fort, terminé en 1703, le nom de Tourville, juste souvenir de l'Amiral d'Escadre qui commanda tant de batailles destinées à chasser les barbaresques hors de la Méditerranée.
Ah... ce Monsieur de Tourville, mort précisément en 1701, à qui Louis XIV voulut rendre hommage : un capitaine certes, mais pas de pacotille, de ceux qu'on imagine avoir largement participé aux conquêtes royales du Grand Siècle.
Anne Hilarion de Cotentin, comte de Tourville, nait en 1642 en Normandie ; sa famille l'inscrit dès l'enfance dans la légende — ou plutôt dans le postulat d'Etat — par la nomination dans l'Ordre de Malte à l'âge de 14 ans. Il devient capitaine de vaisseau à 25 ans, mène, la même année, les plus courageuses batailles d'Agosta et de Palerme, sabre les mers du Sud de son héroïsme, est de tous les fronts d'Alger à Tripoli, livre l'abordage de galère à galère.
Sur un seul vaisseau armé en course, il soutient l'effort de six vaisseaux pendant huit heures de combat, ce qui le fait nommer, en 1677, Chef d'Escadre et Lieutenant Général des Armées Navales du Roy, à 35 ans à peine. Libérant Brest des flottes anglaises et hollandaises, il recevra en définitive le titre de Vice-Amiral des Mers du Levant en 1689. On peut croire aisément que son nom fleurit bien des Forts, des caps et des péninsules normandes, mais sa gloire méditerranéenne lui vaut le nom de cette île sur les cartes du littoral marseillais au XVIIIème siècle.
Et puis les siècles passent, un ou deux... Qui n'ont guère laissé de repères.
En 1861, le Fort fut réorganisé ; il présente l'architecture qu'on lui connaît aujourd'hui.
Encore quelques décennies jusqu'à la Belle Epoque : l'Exposition Universelle, les rêves coloniaux, qui amènent dans la cité phocéenne capitaines d'opérette, commandeurs en habit et leurs troupes d'artistes de music-hall. Quelques mois avant la guerre de 14-18, la légende veut ressurgir sur le littoral marseillais. L'île et l'eau, symbole d'ailleurs exotiques, le ressac de la mer bleue nous dira-t-il combien de marins endimanchés y amarreront leurs fantasmes pour une poignée de dollars ou les beaux yeux d'une danseuse nue ?..
L’ île aux fêtes…
Liane Degaby, artiste célèbre à l'aube de la Grande Guerre, avait posé très avantageusement pour la cause de la Nation.
«S'il le faut» avait-elle soupiré, drapée dans une dignité légère et invisible, le cœur offert à la paix pour les bonnes grâces de ses commanditaires républicains ou -peut- être déjà les exigences d’un impressario. Quoi qu'il en soit, elle fit un beau mariage. L'industriel marseillais, André Laval succombe au charme de la belle Liane.
Ils étaient très heureux et pour y montrer ce bonheur qu'on ne saurait cacher, l'industriel offre à son égérie une île où ils chercheront le rêve à deux. «On y fera un théâtre pour les muses des mers» s'exclamera Liane Degaby.
Tout le monde s'accorde à trouver le séjour enchanteur, on parle d'heures délicieuses au milieu des flots et l'azur, on consigne dans le livre d'Or le souvenir des minutes douces, d'instants ineffaçables…
Cette minuscule traversée — pour laquelle il fallait l'autorisation du capitaine de frégate, chef de l'État Major — prenait des allures de croisière idyllique, d'invitation au voyage : le soleil, les rochers, la mer…
La guerre éclate, la guerre finit, et Laval revient, valeureux. Les séjours peu à peu s'estompent ; les pillages, le vandalisme finissent par avoir raison de l'enthousiasme de la célèbre propriétaire. Elle qui voulait léguer ce symbole de beauté à la Ville ; elle qui faisait montre de tant de charité, conclut, désespérée : «l'île sera mon tombeau». Le couple y fait ériger une croix. Le tombeau reste une énigme. A-t-il été construit ?.. Un autre pan du mystère que la légende préférera garder.
Aux fêtes, aux réceptions, succèdent la solitude, les décennies de sommeil, l'île abandonnée, une deuxième guerre, le renouveau des années 60 fait nourrir des projets grandioses. Monsieur Boursier, restaurateur et homme d'affaires, voulut y installer un complexe hôtelier avec dancing et casino, allant même jusqu'à imaginer de relier l'île à la terre par un téléphérique, un tunnel ou un funiculaire... Et finalement un hélicoptère…
Le mythe américain à nouveau s'évanouit, et l'île passa à de nouveaux propriétaires. Vingt ans encore, l'île est abandonnée, livrée aux visiteurs à qui elle appartient désormais, car le rêve n'est à personne.
Achetée en juillet 2001 par de nouveaux propriétaires, elle retrouve la vocation de la fête que lui avait donnée Liane Degaby et sert de lieu d’exception aux manifestations de Relations Publiques ou d’événements privés.
A l'intérieur de l'île, il existe un puits naturel, une grotte marine dont l'eau, suivant l'heure, prend des teintes bleues ou vertes ... L'île n'en finit pas de susciter les passions, d'en appeler à l'imaginaire des hommes et de fendre de sa proue de rochers un ciel toujours plus profond.
D’après le textes d’ Adrienne BORRELLY-STRAPPAZZON
(extraits de la revue « Marseille – revue culturelle » N°181 de septembre 1997)